Automne 2022
 – N° 4
 – Bossay-sur-Claise, France
Henri Thiennet, 102 années bien remplies
Agriculteur, passionné d’histoire locale, Henri Thiennet a fêté ses 102 ans cette année. Avide de connaissances, il reste cet observateur de la nature et de son village de Bossay-sur-Claise qu’il n’a jamais quitté. Rencontre.

« C’est quand même curieux d’arriver à 102 ans… Il n’y a pas de secret, c’est providentiel. » En quelques mots, tout est dit par Henri Thiennet, petit homme à béret recroquevillé dans son fauteuil. Entre temps, nous serons passés de sa cuisine-cocon à sa chambre-salon « plus confortable ». En cette fin d’après-midi, les bras d’un soleil amical traversent l’espace d’une fenêtre à l’autre pour le réchauffer. L’ouïe d’Henri se limite à une oreille, mais la mémoire est au rendez-vous. Il lui faut juste le temps – ses silences émailleront l’entretien – d’aller la repêcher dans les méandres d’une vie jamais rassasiée de connaissances.

Un livre en témoigne d’ailleurs intitulé Mémoires d’un vieux terroir dans le Sud Tourangeau *. Il rassemble ses souvenirs d’enfance et ceux de sa vie de paysan, aussi les légendes sur sa commune située entre Berry et Touraine, ainsi qu’un inventaire des lieux-dits avec leur signification. Ce parcours est un vrai et authentique trésor sur la vie paysanne d’un siècle disparu. « Je n’ai pratiquement jamais quitté ma ferme. Je suis né au bout du village dans celle de mon grand-père. » Le village, c’est Bossay-Sur-Claise. La maison, celle qu’il a « achetée après la guerre, puis restaurée ». Avant cela, c’est un certificat d’étude obtenu à l’âge de 12 ans, puis huit mois dans les chantiers de jeunesse, un travail d’ouvrier agricole au service de son grand-père, puis de son père… En 1953, son mariage avec Marie-Thérèse qui l’a « beaucoup aidé. »

Insatiable curieux

Et en filigrane, comme un phénomène tellurique invisible qui alimentera constamment sa boussole intérieure, une insatiable curiosité. « J’ai beaucoup lu et je m’intéressais à tout, et voulais tout comprendre à fond. » La pointe de flèche préhistorique en silex trouvée par son père l’incite à chercher conseil auprès du journal le Réveil Lochois. Celui-ci le dirige vers le directeur de l’école Mirabeau à Tours avec lequel il va prendre l’habitude de prospecter dans les champs bosséens. Les haches polies et autres bifaces seront cachés « dans le jardin sous les planches de petit pois » lors de l’occupation… Quelques 900 pièces sont ainsi exposées au musée communal. Les 80 caisses supplémentaires ont pris le chemin du musée départemental du Grand-Pressigny.

Le toujours membre honoraire de l’Association de préhistoire et d’archéologie de Bossay-sur-Claise (APAB) nourrit également une passion pour l’histoire locale. C’est ainsi que ses bulletins se sont mués en livre. « Mais il  n’y en aura plus, ma mémoire ne peut plus », avoue-t-il dans un dernier rire qu’il semble souvent adresser à lui-même. Un secret de longévité avant de se quitter ? Peut-être celui du médecin qui lui avait conseillé de négliger « la charcuterie et les confiseries artificielles » au profit des légumes et d’un usage modéré de la viande… Conseil de centenaire.


*Edition du Centenaire-Editions La Simarre. Réédition par l’Association de préhistoire et d’archéologie de Bossay-sur-Claise (APAB). Disponible au Musée de préhistoire et d’archéologique de Bossay-sur-Claise ou à la Société archéologique de Preuilly-sur-Claise.

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